Le fusil 828 U est le seul modèle superposé de la marque italienne Benelli, que l'on connait plus pour ses très nombreux modèles de fusils semi-automatiques. Certains sont de vrais emblèmes pour la marque italienne, citons le Raffaello, le Vinci, le Montefeltro et bien sûr le Super Black Eagle, véritable légende chez les chasseurs de gibiers d'eau. Il était donc difficile de penser que Benelli pouvait créer la surprise en lançant son superposé 828 U en 2015 ! Et pourtant… l'italien a non seulement produit un fusil fiable, mais aussi beau et surtout sans y perdre son âme et son image. En effet, le 828 U ressemble sévèrement à un fusil semi-automatique, ses deux canons mis à part et il en possède d'ailleurs les avantages !
Mais d'ailleurs d'où vient le nom de ce modèle 828 U ? Tout simplement de la liste du Patrimoine Mondiale de l'Unesco et dans laquelle 828 est le nombre qui désigne le centre-ville historique de la ville d'Urbino où se trouve l'usine Benelli !
Ce test débute par l'ouverture de la mallette en polymère et le nouvel acquéreur reste déjà bouche bée devant le magnifique intérieur de cette dernière, entièrement doublée de tartan typiquement écossais. Le fusil trône sur le flanc et une belle boite portant le nom du modèle et de la société contient les chokes pour les canons et les cales pour la crosse. Avouez que c'est plus joli qu'une boite en carton. On en a pour son prix !
La crosse et le devant
La crosse et le devant de ce 828 U Beccacia sont confectionnés en noyer. Ils reçoivent un traitement de surface qui renforce les veines du noyer à l'aide d'un laser. C'est assez bien réalisé sur la crosse de notre exemplaire de test, plus visible sur le devant. En fait un laser brûle le bois en surface selon un dessin prédéfini afin de simuler des veines naturelles du noyer. Ce procédé permet de donner plus de charme et de relief à des pièces de bois d'entrée de gamme. La crosse est très technique. En premier lieu, et c'est l'atout majeur de ce superposé, elle est fabriquée comme celle d'un fusil semi-automatique et il est possible grâce à des intercalaires de modifier simplement la pente et l'avantage de ce 828 U. Benelli fournit un nombre impressionnant de cales qui permettent de modifier pente et déviation installées. A la base elles sont respectivement de 55 mm et de 6 mm à droite. Les pentes de crosse en dotation sont de 42,5/45/47,5/50/52,5/57,5/60/62,5/65 mm et les déviations en dotation sont de 6 mm gauche/ 3 mm gauche/ 3 mm droite.
La longueur de la crosse est de 36,5 cm de la queue de détente à l'extrémité de la plaque de couche. Elle peut être portée à 37,5 cm avec un sabot plus long. Le Benelli 828 U est doté du système de réduction du recul très efficace Progessive Confort. Des lamelles de caoutchouc vont plus ou moins se déformer et donc encaisser le recul suivant la puissance de la munition tirée. C'est un système qui s'adapte et qui est très polyvalent. Il est pensé un peu comme des amortisseurs à lames sur certains véhicules. Avec une cartouche de 28 g seules les premières lames plient sous la contrainte, mais avec une 36 g ou une semi-magnum toutes les lames plient. Seul bémol pour une arme de bécassier qui rentre dans le sale c'est que cette plaque de couche comporte des trous dans lesquels brindilles et boue peuvent entrer. Un petit nettoyage au retour à la maison s'imposera. Le dos de la crosse reçoit un busc en polyuréthane très ferme qui ne nuit pas à l'épaulé mais qui va protéger la pommette du chasseur. Utile avec une arme aussi légère ! La poignée pistolet est de bonne taille, 3,8 cm au plus large et assez longue ce qui permet à chaque morphologie de main de trouver une bonne position de tir. Elle est recouverte d'un quadrillage en forme d'écaille de poisson réalisé au laser et donc d'une régularité impressionnante. Il y a le même quadrillage sur le devant.
Le devant du 828 U est tout aussi technique. Vraiment rien n'a été laissé au hasard sur cette arme ! Pour le détacher il faut d'une part appuyer sur la pompe, le petit bouton très discret situé à l'extrémité du devant et en même temps presser le devant bois et les canons ensemble. Il y a un cran de sécurité qui les maintient en place afin que le devant ne se détache pas par inadvertance. Ce devant bois possède donc une mécanique à l'intérieur avec un long ressort qui actionne la pièce mobile qui vient se loger dans le verrou soudé sous le canon du bas.
La bascule
C'est la pièce maitresse de l'arme. Elle est confectionnée en Ergal, un alliage léger et elle est longue de 19 cm et elle est anodisée en surface d'une couleur « brun nature ». Elle reprend certaines formes d'un fusil semi-automatique. Benelli a magnifiquement travaillé les formes de cette bascule afin qu'elle n'apparaisse pas trop massive. Des lignes et évidements crées des volumes et des reflets. Une différence de traitement entre le dessus de la bascule et les flancs accentue encore ces effets de surface. Le nom du modèle simplement gravé et doré contraste bien. Sur le dessus l'arrière de la bascule est assez massif avec une clé d'ouverture étonnamment positionnée à gauche (arme pour droitier) de la surface plate du dessus. L'ergonomie est excellente est c'est une bonne chose car lorsqu'on l'actionne on sent un point dur à mi-course. C'est normal, c'est en manœuvrant cette clé d'ouverture que l'on arme les marteaux des percuteurs ! Une action assez inédite.
Le verrouillage oscillant de ce fusil superposé est solide, c'est une variante du type Jaeger qui équipe certaines carabines mono-canon. Le bloc de verrouillage en acier trempé est mobile, d'où le nom oscillant et s'avance un peu lorsque l'arme est ouverte. La base de la frette mono bloc sur laquelle sont soudés les deux canons comporte une saillie qui vient se loger dans une mortaise usinée à la base du bloc de verrouillage oscillant. La frette et les canons sont donc bien maintenus par le bas, il ne reste plus ensuite qu'à achever le système de fermeture avec deux verrous latéraux disposés dans la partie haute de la frette et qui sortent de part et d'autre de la bascule, juste en dessous de la clé de verrouillage. C'est un peu le même système que sur le Beretta Silver Pigeon avec les verrous coniques qui se logent dans les ailerons de part et d'autre des canons. L'arme est éprouvée à 2500 bars, c'est beaucoup…
Même le système d'éjection est innovant. Benelli n'a pas opté pour un système dont les éjecteurs sont armés par l'ouverture et le basculement des canons. Il faut reconnaitre que ce système oblige parfois à forcer lors de cette opération et ce n'est pas agréable. Non là c'est un système ingénieux qui a été mis au point. Les chambres sont forées. Lors du tir, du gaz issu de la combustion de la poudre passe dans ce trou percé dans la chambre et actionne un piston qui arme les éjecteurs. Du coup l'ouverture et la fermeture du 828 U se font sans point dur !
Les départs
Là aussi le 828 est atypique puisqu'il est équipé d'une batterie amovible. Cette sous-garde se dépose à l'aide d'un petit outil très simple. Le processus est bien décrit dans l'épaisse notice livrée avec l'arme. Cela permet de nettoyer l'intérieur de la sous-garde et de neutraliser totalement l'arme chez soi en rangeant ces éléments séparément. La batterie en ligne offre une rapidité de tir appréciable sur le terrain pour doubler à la volée un gibier. Les départs sont bons. Si l'on s'amuse à appuyer très doucement sur la queue de détente lisse et dorée, il y a une zone qui gratte un peu avant que le mécanisme ne se libère franchement après une course de 5 à 6 mm. La sensation et le bruit s'apparente un peu au mécanisme d'un semi-auto avec des départs un peu spongieux… Mais si l'on appuie normalement, comme à la chasse, sur cette queue de détente cette sensation disparait et la légèreté des poids de départs subjugue. Le fabricant annonce des poids de départ avoisinant les 1,8 kg, ce que nous confirmons après mesures avec un appareil dédié à cela.
Les canons
Chambrés en calibre 12, ils mesurent 61 cm seulement et sont traités noir mat anti-reflet. Ils sont fabriqués en acier de très bonne qualité et reçoivent un traitement cryogénique qui améliore leur vibration et leur qualité balistique. Ils sont alésés à 18,5 mm (Power Bore) et reçoivent des chokes amovibles à leur extrémité. Ils sont soudés à la frette qui comporte les chambres de 76 mm. Ils basculent vers l'avant en prenant appui sur des tourillons usinés sur des plaques d'acier fixées sur les flancs de la bascule. Il est donc facilement possible de les changer si besoin. La conception du verrouillage limite toutefois vraiment les contraintes portant sur ces tourillons.
Les canons ne sont fixés entre eux que par la frette à l'arrière et une cale soudée à leur extrémité. Les bécassiers penseront bien à ôter le devant pour bien faire sécher les canons et le devant bois à l'issue de la chasse et à nettoyer la partie intermédiaire libre entre les tubes.
La bande ventilée haute est en carbone. On voit un petit décroché lorsqu'on épaule l'arme. Elle est très bien finie et assez ajourée pour gagner du poids et renforcer l'esthétique. Elle est clipsée sur le canon supérieur. Elle mesure 7 mm de largeur et elle est terminée par un guidon en fibre optique jaune bien visible en sous-bois.
Les chokes
828 U Beccacia de Benelli est livré avec quatre chokes de 70 mm éprouvés pour le tir des billes d'acier. Ils se vissent à l'avant des canons et les logements prévus pour cela donnent un très léger effet tromblonné à l'extrémité des canons. Il y a un choke cylindrique, un quart, un demi-choke ainsi que le modèle Ampliator interne qui élargit la gerbe de grenaille à courte distance entre 10 et 20 mètres. Benelli assure que ce choke garantit une gerbe utile supérieure de 32 % par rapport à la concurrence. Oui mais avec quel autre fusil et équipé de quel choke ? En tout cas j'ai testé ce modèle à la même distance et j'ai pu comparer la gerbe fournie par une cartouche Fiocchi Woodcock par rapport au choke cylindrique. Elle est en effet plus ouverte.
Ces chokes sont livrés dans une belle boite translucide avec une burette d'huile et la clé pour les démonter.
Sur le terrain
C'est au stand de tir que j'ai pu tester ce fusil afin de juger de la rapidité de tir, de l'extraction de cette arme et de la qualité des gerbes produites par les différents chokes. Le fusil est très léger, il est vif et maniable.
J'ai tiré des munitions de sport en 28 g pour vérifier la qualité des départs et le système d'éjection, tous deux parfaits.
J'ai ensuite effectué des tirs sur cible afin de pouvoir vous montrer les gerbes produites par ces excellents canons. J'ai fixé le choke cylindrique, pour être cohérent avec la destination chasse de la bécasse de ce fusil et je me suis placé à 15 m de la cible. Voici les résultats en image avec à la fin le test du choke Ampliator, censé ouvrir encore plus la gerbe à courte distance !
Vous noterez que les gerbes sont superbes, avec des grains bien repartis, sans trous ni concentration malgré la distance de 15 m seulement. J'avais visé plein centre, les gerbes sont un peu dans la partie supérieure de la cible. C'est parfait, il suffit de souligner le gibier pour être en plein dedans. Dans le pire des cas, avec toutes les cales fournies il sera aisé de corriger la pente pour compenser!