Le Classic est le superposé Beretta le plus séduisant que la marque ait développé depuis le bel Onyx White, il y a largement une décennie.
Il est rare que nous choisissions, avant même de débuter la rédaction d'un compte-rendu d'essai, de le placer sous le signe des sensations, des émotions. Notre texte commence usuellement par une description « statique » de l'arme. Puis vient la relation de nos perceptions en action, de la « valeur d'usage » du modèle. Enfin seulement nous laissons parler notre subjectivité. Parfois sous la forme d'un vif enthousiasme, plus souvent avec un sentiment assez neutre surtout ces dernières années où les armes de caractère se sont faites rares quelquefois encore, lorsque c'est malheureusement notre ressenti, en exprimant une franche déception. Eh bien, cette fois, nous commençons... par la fin !
Plongée dans la passion
Car, situation peu courante voire exceptionnelle pour un superposé Beretta, le Silver Pigeon I Classic nous a spontanément plongés dans la passion. Proposé à 2 770 environ, quelle qu'en soit la variante ou le calibre, ce fusil est pétri de talent, de brio, de maestria ! Notre exemplaire de test en 12/76, doté de canons de 71 cm à chokes interchangeables intérieurs, apparaît certes un peu lourd à 3,260 kg, il souffre d'un net déséquilibre vers l'avant (point d'équilibre situé 21 mm devant l'axe de la bascule) et les performances balistiques de ses embouts amovibles de 51 mm de long affichent d'évidentes limites à partir du trois-quarts-choke. Il y a bien aussi la sûreté rêche à ôter lorsque l'arme a été mise en sécurité. Mais ce sont vraiment nos seules réserves. Et il suffit de choisir la variante dotée de tubes de 67 cm pour que le souci d'équilibre soit résolu et que notre critique sur le poids se trouve nettement atténuée. Il ne subsiste alors que les gerbes perfectibles (surtout, bizarrement, avec les cartouches dotées d'une bourre à jupe et godet) dans les chokes les plus « serrés », pour tempérer notre désir de couvrir le Classic de superlatifs, exclusivement de superlatifs !
Ce fusil est né de la rencontre de deux tendances majeures du moment. La nostalgie, valeur dominante des années difficiles que nous vivons, qui nous conduit à regretter des temps pas si anciens beaucoup plus sereins. Et le retour de bribes d'optimisme chez les chasseurs, qui les détournent des productions « low-cost » (à bas coût), certes peu dispendieuses mais sans charme, pour les orienter plutôt, depuis le printemps dernier, vers les réalisations de « luxe raisonnable ».
Souvenirs, souvenirs...
Deux bonnes raisons pour que le moderne Onyx White se soit retiré, et que le beaucoup plus traditionnel Classic voit le jour. Le plus jeune des Silver Pigeon, une lignée apparue en 1994 mais prolongeant la célèbre famille des S 55, S 56 et S 57 introduite en 1956, illustre formidablement les deux impulsions que nous venons d'évoquer.
Pour la nostalgie, il retient une ligne intemporelle et élégante caractérisée par son long devant à extrémité « tulipe », la découpe de la partie supérieure de sa bascule emblématique de la signature Beretta, et sa belle crosse pistolet à la courbure de poignée extraordinairement harmonieuse. Il y ajoute une gravure (mécanique) évoquant les tapisseries cynégétiques du XVIII e siècle et une plaque de couche en noyer inspirée de majestueuses réalisations artisanales.
La touche luxueuse provient, elle, du somptueux le mot n'est pas usurpé noyer de la crosse et du devant, rehaussé de quadrillages d'une exceptionnelle finesse et d'un ponçage satiné à l'huile fastueux. Avec comme ultimes raffinements une détente dorée et un insert également doré dans la crosse prêt à recevoir les initiales ciselées de l'acquéreur. Tout cela est à cent lieues du « tape à l'œil » fréquent chez les fabricants italiens et espagnols... sans même aborder le mauvais goût de la plupart des armes de pseudo-luxe turques. Et propre à faire pâlir de jalousie certains concurrents de la firme qui se sont essayés à cette symbiose de la nostalgie et du luxe abordable avec infiniment moins de maîtrise.
Que des éloges !
Quant aux sensations sur le terrain, elles sont à l'unisson. La prise en main, le placement à l'épaule, la conduite de la visée rassemblent tous les éloges. Comme la franchise et la netteté parfaites de la détente unique sélective à fonctionnement mécanique. La puissance et le guidage impeccable des éjecteurs à ressorts. La douceur du recul avec les charges de plombs jusqu'à 40 g et de billes d'acier jusqu'à 32 g (y compris en « haute performance », pour lesquelles le Classic subit bien sûr l'épreuve adaptée). Enfin la rigueur des ajustages canons-bascule et la vigueur du verrouillage. Tout cela confère à ce fusil un plaisir de chasser avec lui aussi intense que celui éprouvé à le regarder et à le posséder, avec une efficacité à l'identique. Le Silver Pigeon I Classic honore dans tous ses aspects, qu'il s'agisse d'intelligence de conception, de rigueur de fabrication, de méticulosité de finition ou d'efficience en action, la signature qu'il porte. Une formidable acquisition à effectuer les yeux fermés... avant de s'ébahir à sa découverte en les ouvrant !·
Points Forts
+ Conception et fabrication rigoureuses
+ Fiabilité et robustesse éprouvées
+ Prise en main et visée magistrales
+ Détente parfaite
+ Grand confort de tir
+ Ligne élégante
+ Présentation et finition raffinées
+ Bois superbes
+ Prix contenu
Points Faibles
– Déséquilibre vers l'avant (avec canons de 71 cm)
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