Pas facile de se renouveler dans le petit monde de la carabine à verrou… Les fabricants jouent souvent sur des arguments marketing et les vraies innovations ne sont pas nombreuses. C'est pourquoi lorsque Sako a annoncé la sortie de sa carabine « hybrid », la S20 en février dernier, les amoureux de la marque étaient réjouis. Que propose donc cette nouvelle arme ? La polyvalence ! Son secret, elle est construite autour d'un châssis en aluminium qui permet d'assembler crosse, devant et boitier de culasse de façon rigide et donc précise.
La crosse et le devant de la S20 Hunter
C'est sur cette partie de l'arme que le finlandais Sako a tout misé ! La S20 est en effet proposée en deux versions, la Hunter, destinée à la chasse avec une crosse à trou de pouce et devant rond assez fin et l'autre , baptisée Precision, dédiée au tir en stand avec une crosse assez massive, évidée à sa base afin de multiplier les options de positions de tirs sur sac de sable ou bi pied. Le devant du modèle tir est plat sous le dessous, pour bien se caler sur un sac de tir ou un chevalet et il est muni d'un rail Arca avec emplacements QD et M-Lock pour fixer des accessoires comme un bi pied par exemple. L'innovation c'est de pouvoir mixer ces deux crosses et ces deux devants afin de créer l'arme de votre choix, en fonction de vos besoins. C'est une bonne idée, c'est polyvalent ! Sako insiste sur cette possibilité de modifier les formes de crosse, qui plus est ces pièces détachées ne sont pas trop chères (331 € pour la crosse et 152 € pour le devant chasse, 380 € la crosse et 228 € pour le devant dédié au tir) Dans les faits, je ne suis pas sûr que beaucoup de chasseurs passent de l'une des versions à l'autre, idem pour les tireurs car le canon quant à lui n'est pas interchangeable. Alors oui, en prenant par exemple le calibre 270 Winchester ou le 308 Winchester on peut aller chasser et ensuite aller tirer sur cibles avec un large choix de balles dont des chargements « cible » peu couteux. Mais celui qui se sent bien avec son arme et sa crosse ne va pas en changer parce qu'il va à la chasse ou au stand. Qui plus est le démontage de la crosse et du devant prend un peu de temps et demande de la rigueur. Ce n'est pas le démontage d'un devant de Merkel RX Helix !
Pour en revenir à la très bonne crosse à trou de pouce qui équipe ma carabine de test, elle est très bien réalisée. Elle est grise, confectionnée dans un polymère très résistant et bien lisse. Les inserts de la poignée et du devant ainsi que le boitier de culasse noir contrastent bien avec ce gris foncé. La poignée est très droite, l'avant est gainé d'un insert synthétique qui imite bien un cuir grainé noir. La prise en main est très bonne car le pouce qui passe dans le large trou est accueilli de l'autre côté dans une gouttière qui offre une bonne prise en main et permet au pouce de se refermer comme une pince sur la poignée. L'écartement avec la queue de détente est assez large, attention aux petites mains ! Ce trou de pouce très large ne gêne donc en rien le retour de la main après avoir rechargé, un reproche que l'on entend parfois sur certaines crosses dont le trou est petit et qui peut en effet faire perdre un peu de temps en battue lorsqu'il faut recharger et tirer très vite une seconde balle.
La crosse mesure 36 cm de longueur de la queue de détente jusqu'à l'arrière de la plaque de couche. Il est possible de la rallonger ou raccourcir en fixant ou ôtant des cales intermédiaires plutôt esthétiques entre la crosse et le sabot amortisseur qui est bien efficace sur le terrain.
Un busc réglable en hauteur permet d'ajuster la position de la pommette du chasseur en face de l'axe de l'optique de tir, lunette ou point rouge. Le busc se règle sans outil, c'est très bien ! Il suffit d'appuyer sur un bouton situé sur le flanc droit de la crosse pour faire monter le busc à la hauteur voulue. Il y a des crans indexés qui assurent un bon maintien du réglage.
Le devant de ma carabine de test est donc celui du modèle chasse. Il est cylindrique et assez fin. Il offre une bonne prise en main.
La crosse et le garde main sont munis de plusieurs systèmes de fixation de la bretelle de port. Il est possible de la positionner sur les attaches grenadières fixes qui sont placées sous la crosse et le devant. On peut aussi choisir des attaches rapides, livrées avec la carabine et dont les logements sont percés sur les flancs droit et gauche de la crosse et du devant. Il est alors possible de porter la carabine à plat dans le dos. C'est très confortable pour les longues marches. La carabine est bien stabilisée à plat dans la dos. Cela permet du coup d'utiliser l'anneau porte grenadière du devant pour fixer un bi pied repliable par exemple. Les finitions de la crosse sont très bonnes, toutes les vis à tête torx sont bien accessibles. Elles permettent de désolidariser la crosse et le devant pour transporter l'arme dans une mallette courte, idéal en avion, ou bien pour passer d'un modèle de crosse à l'autre.
Le boitier et la culasse
C'est un nouveau boitier de culasse ! Il aurait été tentant de rependre le très éprouvé modèle 85 mais Sako a fait le choix de développer un nouveau boitier de culasse. Il est en acier, bronzé noir et possède une forme assez anguleuse. On retrouve un peu la forme du boitier de culasse de la Tikka T3X avec des flancs droits et une forme octogonale. Sur la Sako S20 c'est encore plus vrai que ce boitier de culasse vient se loger dans un berceau en alliage d'aluminium dans la crosse qui va assurer une rigidité maximale de l'arme et explique surement les très bonnes performances en termes de précision. Cette sorte de bedding rigide laisse bien sûr le canon flottant mais assure une excellente cohésion entre la crosse et le boitier de culasse. Des embases de rail Picatinny sont fraisées sur le dessus du boitier de culasse et permettent de fixer rapidement et efficacement les optiques de tirs, viseurs à point rouge ou lunette de visée comme dans le cas présent. Une large fenêtre d'éjection permet de voir la culasse traitée inox un peu brillant. Cette culasse est assez longue et très fluide, faisant honneur une fois encore à Sako dont les modèles sont connus pour cette fluidité exemplaire lors du rechargement ! La tête de la culasse compte trois tenons qui vont verrouiller le mécanisme. Ces trois tenons offrent un angle de verrouillage de 60° ce qui permet de monter une optique assez bas sur le boitier et offre un gain de temps pour le maniement. L'avant des tenons et un peu biseauté ce qui rend la fermeture plus douce. L'arrière en angle droit assure une fermeture à toute épreuve. Le levier de culasse est long et cylindrique. Il semble issu dans son dessin des carabines de tirs à longue distance. Les trois stries sur la partie cylindrique offrent une excellente prise en main, qu'elle soit nue ou gantée. La racine de ce levier de culasse vient se loger dans une découpe du boitier ce qui joue le rôle de tenon de recul.
La tête de culasse est en forme de coupelle. On y distingue le trou du percuteur, la griffe de l'extracteur qui est assez large et l'éjecteur à piston. Rien que du très classique qui fonctionne très bien. La noix de culasse à l'arrière est en polymère noir. Elle est biseautée et assez fine visuellement. Sur la partie plate à l'arrière de cette dernière on voit nettement une languette en inox munie d'un point rouge qui indique visuellement et tactilement que le percuteur est sous tension. L'arrêtoir de culasse est placé sur le côté gauche du boitier. C'est un modèle classique, il suffit d'enfoncer l'arrière de ce bouton pour pouvoir sortir la culasse du boitier.
La sureté
L'arrêtoir de sureté est placé sur le haut à droite du boitier de culasse. Il possède deux positions : sureté et feu… cette dernière est clairement indiquée par un point rouge visible. La mise en sureté de l'arme bloque le levier de culasse en position fermée. Si vous voulez ouvrir la culasse en position sureté il faut enfoncer une discrète petite pédale placée juste à l'avant de l'arrêtoir de sureté. Il est alors possible de soulever le levier de culasse et de charger ou décharger l'arme en toute sécurité ?
Le canon
Fabriqué chez Sako qui jouit d'un excellent avoir faire en la matière et d'une très bonne réputation, le canon de ma S20 de test m'a vraiment bluffé en termes de précision ! Je l'ai testé avec cinq munitions différentes et toutes ou presque m'ont offert des trèfles à 50 m, voir même un seul trou avec trois tirs ! Deux longueurs de canons sont proposées : 51 ou 61 cm. Celui de test ne mesure « que » 51 cm. C'est presque un modèle semi lourd, il est cannelé ou fluté et terminé par un filetage qui m'a permis de fixer un modérateur de son SL5 d'ASE Utra. La finition de surface est parfaite, noire en ce qui concerne la carabine de test mais elle peut être aussi inox brillante ou revêtue d'un traitement Cerakote.
La Sako S20 est proposée dans huit calibres, plutôt polyvalents chasse et tir. Les amateurs de battue regretteront surement qu'il n'y ait pas le 9,3x62 ! Mais vous pouvez donc choisir entre le 243 Winchester, le 270 Winchester, le 6,5 Creedmoor, le 6,5 PRC, le 7 mm Remington Magnum, le 30-06 Springfield, le 308 Winchester et le 300 Winchester magnum.
Le chargeur amovible
Il est confectionné en polymère très résistant et contient cinq cartouches en calibre standard et trois en magnum. Avec celle glissée dans la chambre vous voilà avec une belle puissance de feu sur le terrain ! En 308 Winchester, calibre de mon arme de test les cinq munitions sont placées en pile imbriquée dans le chargeur pour un gain de hauteur. Le puit de chargeur est large et l'insertion se passe sans encombre. Un bouton poussoir est placé à l'avant de ce puit de chargeur afin de le débloquer. Il n'y a pas de sécurité, une simple pression libère le chargeur. Certains chasseurs craignent de perdre cette pièce, surtout les traqueurs lorsqu'il n'y a pas de sureté, c'est pour cela que de nombreux fabricants optent pour un double bouton... Mon seul bémol est plutôt esthétique. Le chargeur est un peu débordant et sort du devant. Cela crée une petite verrue visuelle. Un chargeur grande capacité est disponible en option. Il contient 10 munitions en calibre standard et 7 en magnum.
Les départs
C'est une Sako et les départs de cette S20 Hunter sont vraiment dignes de la marque Finlandaise ! Pas de course, une détente directe magnifique qui est plus est dont le poids est réglable. Que demander de plus ! Les poids de départs sont donc ajustables entre 1 et 2 kg. Sortie de sa boite ma S20 m'a offert une moyenne de 1 kg tout rond lors de la pesée avec un appareil de mesure spécifique. La sensation est extra. On peut avoir un vrai appui sur la queue de détente et presser doucement pour se faire surprendre par le départ du coup. Cela participe bien sûr aux résultats obtenus sur cible ! La position de la queue de détente est ajustable sur quelques millimètres ce qui permet de bien adapter l'arme à la morphologie de votre main.
Sur le terrain
J'ai beaucoup utilisé cette carabine, au stand bien sûr mais aussi à la chasse. J'avoue que cela fait bien longtemps que je n'avais pas pris autant de plaisir à tester une arme. La carabine est bien proportionnée, c'est une arme à verrou classique mais très agréable. Un confrère d'un magazine de chasse célèbre a écrit au sujet de cette S20 Hunter et de la lunette Burris : « Un équipement idéal pour l'affut à la seule condition que le mirador ne soit pas trop éloigné de la voiture. » J'ai bien ri ! Sincèrement, la carabine S20 Hunter équipée de la lunette Ranger 1-6x24 pèse 4,224 kg… On est plutôt dans une petite moyenne ! Il faut prendre un abonnement dans une salle de sport cher ami !
L'arme est bien équilibrée. La crosse à trou de pouce offre une prise en main de l'arme extraordinaire, même en position d'attente où le chasseur peut maintenir l'arme canon vers le bas en maintenant la poignée sans effort.
Passons au stand de tir. La carabine est posée sur chevalet et j'ai fixé le modérateur de son ASE Utra au bout du canon. Les premiers tests ont été effectué avec une lunette Burris Four XE en grossissement 2-5-10x50.
La cible est placée à 50 mètres, un choix délibéré qui permet de vraiment mesurer la précision de la carabine tout en limitant les erreurs humaines, notamment de visée à plus longue distance. Le moindre écart est ici visible en cible !
Le meilleur groupement fut réalisé avec les munitions Powerhead Blade, des balles monolithiques en cuivre qui passent très bien dans le canon de cette S20. Un trou avec trois balles ! (Lire le test complet de cette balle Powerhead Blade)
Je suis allé à la chasse en battue sur ma société communale et j'ai eu la chance de pouvoir tuer une chevrette et un beau solitaire de 90 kg ce jour-là. La lunette disposant d'un fort grossissement, ce n'est pas le top en battue mais mon poste était bien dégagé et les tirs ont été fait à découvert et à 60 mètres…
J'ai ensuite installé la nouvelle lunette Ranger 6 de Steiner. Avec sa plage de grossissement allant de 1 à 6,, elle est plus adaptée pour la battue ! Passage au stand pour réaliser le test et le réglage de cette lunette de visée Ranger 6 de Steiner, tout se déroule à merveille, c'est une nouvelle fois avec les Powerhead Blade que j'ai le meilleur résultat. Je réalise même un carré magique parfait lors de ce test. (voir la vidéo).
J'ai aussi testé la munition Gamehead Varmint RX de Sako dans cette carabine avec également un très bon groupement. (Lire le test complet de cette balle Gamehead Varmint RX de Sako)
Les Geco Zero passent aussi très bien dans cette S20 (Lire le test de la munition Geco Zero).
Vous pouvez découvrir ici le test complet avec cinq munitions: lire le test
Je rends donc avec regret cette carabine au distributeur Humbert Beretta que je remercie une nouvelle fois pour le prêt de cette arme.
Découvrez les vidéos du test de cette Sako S20